Les amarres sont larguées

Pour débuter ce long voyage je suis parti doucement (mais sûrement) depuis Anchorage la plus grande ville d’Alaska avec ses 288 000 habitants. J’y suis resté quelques jours, le temps de me faire aux dix heures de décalage qu’il y a avec la France, et surtout de redécouvrir, avec plaisir, la sensation de lorsqu’il ne fait jamais noir la nuit. C’est comme si votre corps était boosté en permanence. On peut voir le soleil disparaitre à l’horizon et réapparaître en quelques heures. La nuit passe mais la lumière reste. Un vrai shoot de vitamine D ! Après avoir acheté mon bear spray, et écouté les derniers conseils du vendeur concernant les ours, j’ai quitté la ville en direction du nord.

Le vélo glissait tout seul sur le magnifique bitume américain, le vent me poussait gentiment. Tous les ingrédients étaient réunis pour un démarrage en douceur.

En Alaska tout est vaste, immense et il y a très peu de routes, elles ont toutes un nom propre. Imaginez un peu qu’on fasse pareil en France avec toutes les nationales, les départementales, on serait perdu. Ici il y a l’Alaskan Highway, la Denali Highway, la Parks Highway et quelques autres et c’est tout. Peu de chance de se tromper. Tout le monde parle des routes par leurs noms propres. On s’y fait vite. Mais ça représente bien l’esprit du grand nord. The last frontier comme c’est écrit sur les plaques d’immatriculations des voitures Alaskienne.

Après une semaine passée à pénétrer dans l’immensité de la forêt, j’ai fait la connaissance de Vanessa et Simon un couple belge/québecois qui se rend au Panama. On a décidé de rouler ensemble pendant quelques temps pour aller dans le Parc National de Denali où culmine le Mont Denali et ses 6190 mètres d’altitude.
Je dois dire que je n’avais pas une grande envie d’aller dans le parc. Mais je trouvais mes nouveaux compagnons de routes très sympathiques et je me suis laissé porter par cette belle rencontre. Pour accéder au parc il faut tout d’abord payer 15 dollars (même prix pour les voitures et les cyclistes…). Puis pour pouvoir bivouaquer dans une zone délimitée du parc il faut aller voir les rangers et obtenir une autorisation. J’ai trouvé ça assez pénible et contraignant de devoir faire toute ces démarches juste pour pouvoir accéder à la nature. Le lendemain nous nous sommes finalement élancés sur l’unique route de 70 kilomètres qui s’enfonce vers le Mont Denali. Avec son flot de bus remplis de touristes qui nous prenaient en photos, la route offrait malgré tout une vue superbe sur les montagnes.  Après une journée passée sur le vélo, un vaste marécage à traverser nous attendait avant de pouvoir monter la tente là ou nous étions autorisés à camper. Je crois que ça nous a pris deux heures pour faire 1 kilomètre. Traverser ce morceau de toundra gorgé d’eau n’était vraiment pas une bonne idée, surtout avec les vélos chargés.

Simon et Vanessa devant le Mont Denali caché dans les nuages

Après ces bons moments de partage autour du feu et sur le vélo à pédaler ensemble j’avais besoin d’avancer un peu plus vite dans le paysage. J’ai dit au revoir à mes compagnons.


Je me suis de nouveau retrouvé avec moi même à essayer de prendre conscience que j’était enfin en Alaska. Ce point sur le globe que j’avais tant regardé ces dernières années. Surtout après avoir entendu les histoires D’Alain, 93 ans, que j’accompagnais dans le cadre de mon travail et qui me racontait tous les jours ou presque son périple depuis San Francisco jusqu’à Anchorage à la fin des années 1950. Il était parti en voiture. Je suis en vélo. Mais il y a 70 ans ça devait être une tout autre histoire que de venir jusqu’ici. Paix à son âme il nous a quitté l’année dernière. Mais j’ai une pensé particulière pour lui depuis que je suis arrivé ici, ça a été l’une de mes sources d’inspirations pour m’élancer dans ce voyage.

Peut être la coccinelle avec laquelle Alain est arrivé à Anchorage ?

J’ai donc pris à gauche sur la première Gravel Road de mon périple, la Denali Highway. La route offre une vue incroyable sur une chaine de montagne qui se dresse telle une muraille au loin. Quelques beaux sommets à plus de 4000 mètres d’altitudes d’où s’élancent des glaciers magnifiques. J’étais bien, tout seul, à rouler à mon rythme. J’apercevais les nuages au loin qui s’avançaient dans de multiples directions.
Un soir, alors que je pensais en avoir fini avec ma journée en arrivant aux bords d’un petit lac, j’ai eu la surprise de voir des traces toutes fraîches d’un grizzli. J’ai juste pris une petite douche rapide et j’ai filé un peu plus loin vers un endroit avec une vue dégagée. C’est toujours plus rassurant de pouvoir voir loin autour de soi.

L’Alaska dans toute sa splendeur

Après ces belles journées à travers la toundra j’ai traversé la chaîne de montagne que je longeais par une sorte de canyon d’une grande beauté. J’ai d’ailleurs dormi en plein milieu de celui-ci. Le vent se déchainait mais j’ai pris plaisir à monter la tente et tendre tout bien comme il faut. Quel plaisir de pouvoir se faire un abris au milieu de la tempête. Merci à l’Islande de m’avoir appris à monter des tentes par grand vent.

Le calme retrouvé dans la forêt fut de courte durée, de nouveau la route s’élevait. Et j’étais de nouveau à la merci du vent sur la longue Top of The World Highway.
Cette gravel road a la particularité de longer les crêtes pendant plus de 100 km. Kilomètre après kilomètre je songeais au gens qui avait pensé et construit cette route. Un travail de titan surtout dans ce coin reculé du monde.

La Top of The World Highway

C’étaient mes derniers kilomètre dans l’extrême nord des USA et je les ai savourés. Une belle première partie du voyage se terminait. Et j’arrivais à Dawson City au Canada une ville pour laquelle j’ai eu un énorme coup de coeur.

La suite dans le prochain article.

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